vendredi 21 septembre 2012

Femmes et sans papiers dans les rues de Paris

Oscar JOSEPH se permet de prendre la responsabilite de publier dans le blog du master un article de la Journaliste Gaby SAGET qui se trouve en France et qui manifeste son intention de  s'associer a notre blog et a notre travail.Je me permet de la remercier pour ce choix et de l'interet qu'elle manifeste a notre forum.

 30 000 immigrés en situation illégale ont été expulsés de France l’an passé, un chiffre  en augmentation de 8% révèle un quotidien français(http://www.lefigaro.fr/actualite-france/2011/07/27/01016-20110727ARTFIG00458-clandestins-les-reconduites-a-la-frontiere-vont-augmenter.php ). Les sans-papiers sont privés de tous droits sociaux même du droit au chômage. Malgré les mesures d’expulsion parfois musclées, certains immigrants continuent de braver les interdits à la recherche d’une vie meilleure. Leur sort en France : les petits boulots informels du commerce de rue, les ménages ou pire encore. Tout cela sans protection sociale …
Maïs, ho ! Maïs, ho ! répètent ces trois femmes. Tantôt chanté, tantôt scandés ces deux mots  annoncent ce qu’elles vendent : des épis de maïs grillés. Porte d’Orléans, à la sortie du métro, trois Africaines s’activent… 
Hésitante, la plus âgée d’entre elles se confie. : «  Je viens d’arriver en à Paris,  Je suis dans la quarantaine, dit-elle refusant de préciser son âge. J’ai un grand garçon d’une vingtaine d’année et un petit fils. Ce petit commerce me permet d’arrondir les fins de mois, mais je suis également femme de ménage. »
A l’exception du dimanche, ces femmes sans titre de séjour se tiennent tous les jours, dés 13h00 devant cette bouche de métro. Certaines viennent avec leur bambin, qu’elles attachent sur leur dos à l’africaine. Un épi pour 50  centimes, c’est le prix…
35 Euros de bénéfice
« J’achète 100 épis de maïs tous les jours pour 15 euros. Un chauffeur de camion  qui vient de Bretagne dépose cela chez moi. Je les fais bouillir tous dans une grande Marmite. Si la vente est bonne, à la fin de la journée j’ai 50 euros, cela me laisse 35 Euros de bénéfice » explique-t-elle, avec un fort accent malien. « Lorsque la journée n’est pas bonne, comme aujourd’hui, je donne ce qui me reste à des amies ».
Peut-on parler de gagner sa vie dans ces conditions ? Pourtant, elle parvient quand même à envoyer de l’argent  dans son pays natal, à force d’économie et de débrouillardise.« On gagne un peu d’argent…c’est l’avantage de vivre ici en France, même si on est dans la clandestinité ».
Ceux qui achètent sont généralement des Africains, heureux de retrouver un peu de leur pays à Paris. Mais petit à petit, des Français viennent aussi.  Ce commerce se tient sous l’œil des agents de police qui font la circulation, à deux pas.  « Autrefois je me faisais attraper par les gendarmes ; ils nous faisaient payer une amende. Mais, on a continué. Ils ont vu, peu à peu, qu’on ne faisait rien de mal, à la fin ils nous ont laissé tranquille ».
Cette femme n’ajoutera plus rien. Elle en a déjà trop dit, estime-t-elle. Les autres vendeuses viennent d’arriver. Elles préfèrent garder leur langue. L’expulsion des clandestins est une priorité pour les autorités françaises depuis la loi Besson du 16 juin 2011. Elles doivent donc rester sur leurs gardes.
A cœur ouvert
A l’autre bout de la ville, à la Porte des Lilas, vit Léon. Malgré son prénom masculin, Léon est une femme, une Haïtienne de petite taille et corpulente. Elle a 45 ans, elle est mère de deux enfants et exprime son désarroi.
Son mari vit en France depuis bientôt dix ans. Demandeur d’asile, Léon n’a qu’un  récépissé pour tout papier.  La procédure de régularisation lui semble interminable.
« Je vis ici depuis un an. Je suis arrivée  après le séisme du 12 janvier 2010,  sur  recommandation de mon mari. Je n’ai pas de titre de séjour donc aucun moyen de trouver un emploi légal ».
Depuis qu’elle a rejoint sa famille, elle est une bouche à nourrir de plus. Pourtant, Léon a une longue expérience de travail.
« J’ai travaillé pendant 16 ans comme secrétaire au Sénat de la république haïtienne. Mon diplôme en gestion n’a aucune valeur tant que je demeure sans papier. J’aimerais suivre une formation professionnelle pour donner un peu de  valeur ajoutée à mon CV ».
Mais pour l’instant Léon se contente de petits boulots qu’elle enchaine. Le travail, c’est la liberté dit-elle et pour elle, il n’y a pas de métier ingrat. Elle parvient même à aider son mari en payant certaines factures.
« J’ai voulu passer une annonce pour garder des enfants ;  il faut s’adresser à une agence m’a-t-on dit…Dans  ma situation, c’est désespéré. Alors des amis haïtiens, par solidarité, me laissent leur gamin. Parfois aussi, je fais de la coiffure. Je vais poser des tresses ou  faire une permanente. 40 euros c’est mon tarif ».
Pour l’instant,  Léon se tourne vers des services d’assistance sociale. Elle va chercher de temps à autre, de la nourriture ou des vêtements pour sa famille dans une organisation catholique.
Mais elle critique les agents d’assistance sociale, d’anciens immigrés qui pratiquent, selon elle,  le copinage. Léon prie  tous les jours pour trouver un petit boulot par l’intermédiaire de cet organisme.
« Rien en me rebute, je suis prête des ménages chez des gens », lâche-t-elle dans un dernier soupir.
Cette mère de famille ne retournera pas sur sa terre natale. Sa vie est désormais à Paris avec les siens.
Ces deux cas, parmi 400 mille autres, illustrent le destin de ceux que l’on nomme en France, les illégaux. 400 mille anonymes qui ont tous leur histoire, leur vision de la vie, mais qui au final ne cherchent qu’une seule chose : vivre mieux. Même s’ils doivent le faire dans la crainte de l’expulsion, qui est devenue le leitmotiv de la politique d’immigration de la république ces dernières années.

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