Depuis plus d’une décennie, la langue de Shakespeare infiltre la publicité
en Haïti.
« Low Price
Every Day », « Swag edition
release » : ces slogans, nous les avons retrouvés sur des affiches ou panneaux
d’affichage sans leur traduction en français ou créole dans les rues de
Port-au-Prince.
> Regardez nos photos d’affiches prises dans les rues de la capitale haïtienne :
Christine Coupet, directrice générale de l’agence de publicité Dagmar Productions, pense que la pratique a commencé au milieu des années 90. « Nous avons commencé à intégrer des mots simples comme « yes », « thank you » ou « ok » parce qu’à l’époque les jeunes étaient très friands de l’anglais entendu dans les chansons et les films américains.»
Apartheid
linguistique ?
Comme la majorité des jeunes interrogés, Sandro conteste
l’utilisation de l’anglais dans les publicités en Haïti, même s'il peut les lire. « C’est pour exclure la grande majorité », s’exclame-t-il presque avec rage. Plus positif, Kleber y voit une façon de parfaire son
anglais. « Cela me pousse à toujours utiliser un dictionnaire
» confie-t-il avec un sourire.
Cibler les
milliers d’expatriés
Olivier Bayard de l’agence Publigestion dit devoir
parfois se plier aux exigences de certains annonceurs qui visent le grand
nombre d’expatriés vivants en Haïti depuis le séisme. Quant aux affiches de
spectacle, il assure que ces dernières sont facilement compréhensibles par leur
cible : les jeunes, habitués à utiliser les réseaux sociaux en anglais.
Américanisation ?
Maureen, une Américaine qui vit en Haïti depuis 20 ans,
peste contre cette pratique qui selon elle, américanise à tort une société
haïtienne dotée d’une si belle culture afro-caribéenne.
« L’anglais
ne pourra pas digérer le créole haïtien même si la publicité lui emprunte
beaucoup de mots »
déclare Dr Renauld Govain, professeur à
la Faculté de Linguistique Appliquée de l’Université d’Etat d’Haïti). Pour ce
docteur en sociologie des langues, il n’y a pas lieu de s’alarmer mais il faut attirer l’attention sur ce phénomène. L’état ne
peut pas, selon lui, interdire aux publicitaires d’utiliser l’anglais.
L’anglais continue de toute façon de gagner du
terrain, dans un pays où le français, l'une des deux langues officielles, n’est parlée que
par seulement 15 % de la population, les Haïtiens étant tous créolophones.
Photos et texte: Chancy Victorin
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