jeudi 17 mai 2012

Le ras-le-bol des petits cordonniers de Pétion-Ville

Depuis plusieurs décennies, la production nationale haïtienne de la chaussure est concurrencée par des produits d'occasion en provenance des Etats-Unis. Dans la commune de Pétion-Ville, les recettes des cordonniers s'amenuisent.





Situé au fond d'une route en terre battue, poussiéreuse et parsemée de cailloux, l'espace de travail de Saintil est un petit hangar en bois de moins d'un mètre cinquante. Face à la mévente de ses sandales, ce jeune d'une trentaine d'années au visage émacié a fini par se reconvertir dans le nettoyage et la réparation de souliers. 

Pour lui, cette situation est due à la prolifération des chaussures usagées importées.



Jadis, à l’approche de la rentrée scolaire, chaque famille pouvait commander les bottes de ses enfants chez le cordonnier du coin. C’était la belle époque pour ces artisans du cuir et du plastique. Mais les temps ont bien changé…

Rosemarie, mère de cinq enfants, est âgée de 42 ans. Initiée à la cordonnerie par son époux il y a 10 ans, cette femme plutôt douée a participé à des foires. 
Le couple travaille aujourd’hui dans un coin de la rue panaméricaine, dans la commune de Pétion-Ville (Est de Port-au-Prince).








Rosemarie se dit surprise par l’attitude de certains clients potentiels qui préfèrent acheter des chaussures d’occasion parfois abîmées pour solliciter ensuite ses services.
 




Dans la partie sud de la rue panaméricaine, des passants vont et viennent dans tous les sens. Le soleil est au zénith. En face d’une artère aux trottoirs encombrés de véhicules et de marchands ambulants, un petit hangar de fortune abrite le point de vente de Sovè.

Ce père de six enfants a choisi le métier de cordonnier grâce aux conseils du pasteur de son église, il y a 12 ans. 











Il trouve normal que d’autres citoyens  à Pétion-Ville gagnent leur vie en vendant des chaussures d’occasion.


Des dizaines d'artisans à Pétion-Ville comme Sovè occupent un espace dans la rue pour proposer leurs créations à une clientèle de plus en plus rare. 

Pour l’économiste Eddy Labossière. « Les autorités pourraient accorder des avantages fiscaux aux cordonniers en taxant moins les produits dérivés qui rentrent dans la fabrication des chaussures.» 

Pour décourager les spéculateurs de produits issus de la friperie, l’économiste suggère que l’Etat impose des taxes douanières plus élevées aux importateurs de friperie. 

La vitalité du secteur de la cordonnerie retrouvera-t-elle son niveau d’antan ? Il y a lieu d'espérer que Saintil, Rosemarie, Sovè et tant d'autres encore, échapperont à la concurrence des produits bon marché. Une hypothèse optimiste, qui pourrait se réaliser si des mesures de régulation des prix étaient envisagées par le gouvernement.



Texte et Photos : Belmondo Ndengué 


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Le Nouvelliste
                                                                                 

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